Les voitures deviennent végétariennes
C’était un titre du mensuel Environnement Magazine.
La France, par la loi de finances 2006 adoptée le 20 Décembre 2005, s’engage à incorporer jusqu’à 5,75% de matière végétale dans les carburants selon la recommandation de la Commission Européenne, puis 7% en 2010 (mais ce seuil ne sera atteint qu’à 2012) et 10% en 2015.
Aujourd’hui, le gasoil, l’essence, le fioul domestique en contiennent tous.
Deux situations :
– Gasoil et fioul domestique :
Qui dit gasoil, dit ici gasoil routier, gasoil pêche, DML Diesel Marine Léger, et GNR gasoil non routier.
Dans le gasoil et le fioul les pétroliers incorporent de l’EMAG Ester Méthylique d’Acide Gras ou EMVH Ester Méthylique d’Huile Végétale. De certains végétaux (tournesol, jatropha, colza, soja, palme) est obtenue par pressage des graines (trans-estérification) une huile végétale brute (HVB). L’étape suivante du process est de couper cette huile pure avec du méthanol pour obtenir l’EMAG/EMHV. Le méthanol se présentant sous la forme d’un liquide léger, incolore et inflammable, volatile et toxique.
– Essence :
Pour l’essence il ne s’agit pas d’incorporer de l’huile transformée, mais cette fois de l’alcool transformé. Cet alcool est obtenu par fermentation du sucre de plantes dites sucrières comme la betterave à sucre ou la canne à sucre, soit de l’amidon issu de céréales comme le maïs ou le blé. Cet éthanol pur est transformé en ETBE ou Ethyl Tertio Buryl Ether, avant d’être incorporé à l’essence. En Europe et en France en particulier, le taux d’incorporation de cet ETBE dans nos essences est de l’ordre de 5 à 7%, jusqu’à 10% pour les essences sans plomb SP95 dites E-10, et plus rarement jusqu’à 85% pour certains moteurs acceptant le E-85 (soit 85% d’ETBE et seulement 15% d’essence issue de pétrole).
Pourquoi se met-on à incorporer du végétal dans nos carburants ?
– Parce qu’il faut supporter nos agricultures respectives face à la mondialisation entraînant des tensions sur les cours de toutes nos matières premières agricoles. Tous les pays importants producteurs agricoles dans le monde soutiennent leurs productions adaptées à cette incorporation dans les carburants en mettant en place des législations avantageuses en ce sens. Le Brésil avec sa canne à sucre, les États-Unis avec leur maïs et leur soja, l’Europe avec son colza, l’Afrique avec sa jatropha …
– Parce qu’il faut polluer moins notre atmosphère, et que consommer des carburants n’étant plus 100% issu du pétrole brut rejette moins de certains gaz (mais plus de quelques autres !)
– Parce qu’il faut commencer à moins consommer de pétrole brut, qui devient une matière de plus en plus coûteuse et deviendra de plus en plus rare.
Il existe aussi d’autres raisons, moins avouables celles-là : vendre un liquide moins coûteux à produire qu’un carburant, au même prix que ce dernier, par exemple.
Avantages et inconvénients de ces incorporations :
– Contraintes agricoles :
Pour incorporer de plus en plus de matière végétale (sous forme d’huile ou d’alcool) dans nos carburants, il faut produire toujours plus de végétaux. Pour les produire de manière intensive, l’agriculture va consommer de plus en plus d’eau, d’engrais et de produits phytosanitaires. On va donc polluer plus pour polluer moins ! Autre problème majeur de cette nouvelle orientation : la production est de plus en plus orientée pour répondre à la demande des pétroliers (qui ont d’importants moyens financiers) et de moins en moins pour la consommation humaine de ces mêmes ressources végétales (céréales). C’est surtout criant pour les populations à faibles moyens financiers.
– Contraintes techniques :
La grande majorité des moteurs actuels n’a pas été conçu pour fonctionner avec des carburants incorporant plus de 5% de matière végétale. Les constructeurs font évoluer les technologies de leurs moteurs mais restent encore en retard sur ce seul thème de l’incorporation d’EMAG dans les carburants. Il existe toujours une certaine inadéquation entre les moteurs et les carburants qui les alimentent. Les carburants évoluent bien sûr, et dans le bon sens ; mais globalement trop lentement par rapport à la vitesse à laquelle progressent les technologies des moteurs. Sauf de ce point de vue de la teneur en EMAG où les carburants ont cette fois de l’avance sur les moteurs.
– Contraintes financières :
Les véhicules adaptés aux carburants dits plus “verts” coûtent plus cher à l’achat, et ensuite à l’entretien. Les carburants dits “verts” sont plus chers que les standards : le gasoil B-30 (par exemple en France de marque Diester), l’essence E-10 et E-85 sont généralement proposés à des prix sensiblement supérieurs que le gasoil et l’essence standard. Ces carburants se dégradent plus vite, causent plus de soucis techniques aux cuves et aux moteurs, sont plus contaminés par la bactérie… Et entraînent de fait des coûts financiers induits additionnels.